Le Tribunal de Paris consacre, à la demande de LVMH, l’indépendance des analystes. Le Tribunal de Commerce de Paris fait droit aux demandes formées par LVMH contre Morgan Stanley.

Le Tribunal de Commerce de Paris constate que les faits reprochés par LVMH sont constitutifs d’une « faute lourde » à son encontre et lui causent « un préjudice considérable tant moral que matériel » et condamne Morgan Stanley à lui payer des dommages et intérêts de 30 millions d’euros.

LVMH avait engagé le 30 octobre 2002 une action en responsabilité contre la banque pour manquements graves et répétés aux principes d’indépendance, d’impartialité et de rigueur de ses analyses financières concernant le secteur du luxe.

De 1999 à 2002, alors qu’elle était la banque-conseil de Gucci, Morgan Stanley a systématiquement dénigré LVMH en diffusant des informations fausses ou biaisées dans la presse économique et financière, ainsi que dans ses rapports hebdomadaires consacrés aux sociétés cotées du secteur du luxe (Luxury Goods Weekly). Le Tribunal a déclaré lourdement fautif le fait que Morgan Stanley n’ait pas assuré l’indépendance de ses analystes et ait au contraire lié leur activité à celle de la banque d’affaires.

La  condamnation de Morgan Stanley, conforme aux conclusions du ministère public, confirme la gravité exceptionnelle des fautes commises par la Banque qui, afin de mettre indûment en valeur ses propres clients dans le secteur du luxe, n’a pas hésité à nuire gravement à LVMH en faisant usage de fausses mentions, en dissimulant l’existence véritable de conflits d’intérêts, en mettant fautivement en cause le crédit de LVMH et les qualités de son management, en portant atteinte à l’image de ses marques et en déformant la présentation de ses résultats et de ses perspectives.

Parmi les griefs retenus comme lourdement fautifs contre Morgan Stanley, le Tribunal a, entre autres, pris en compte l’annonce trompeuse en juillet 2002 par la banque d’une probable dégradation de la notation de crédit de LVMH, les déclarations de ses analystes concernant une prétendue « maturité » de la marque Louis Vuitton, l’allégation non fondée d’une destruction de valeur du fait du management de LVMH, ou encore la présentation trompeuse, au travers de multiples mentions incorrectes, des conflits d’intérêts de la banque.

Les fautes caractérisées par le Tribunal sont à rapprocher de celles commises par la banque aux Etats-Unis, où la SEC et le Procureur Général de l’Etat de New York ont révélé la pratique de Morgan Stanley consistant à utiliser ses analystes vedettes au profit des sociétés ayant confié des mandats à son département de banque d’affaires  (voir communiqué SEC n°18117 du 28 avril 2003, selon lequel « au moins de juillet 1999 à juin 2001 [la banque a offert] … de faire diffuser par ses analystes des études comme un outil de marketing afin de récupérer des mandats pour la banque d’affaires ; et failli à l’établissement de procédures adaptées pour protéger ses analystes contre des conflits d’intérêts. »)

LVMH exprime sa satisfaction de voir réaffirmé, en matière bancaire, le principe d’indépendance de l’analyse financière par rapport à l’activité de banque d’affaires. Cette décision consacre la nécessité d’une muraille de Chine dans les banques d’affaires et garantit aux analystes toute liberté d’appréciation au sein de leurs établissements.

Le jugement du Tribunal de Commerce de Paris fera jurisprudence, imposant désormais aux banques d’investissement d’assurer l’indépendance effective de leurs analystes par rapport à leurs services d’activités commerciales.